Débat autour du Podcast Méta-Théorie

Podcast "Méta-Théorie" en pré-écoute :
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Valentin a écrit :
Mes réponses :
A. Sur tes réprécisions quant à ta vision de ce qu'est une relecture critique, je n'ai rien à ajouter. L'important est qu'elles soient mentionnées, ici.
B. Sur la liste bibliographiques, est-ce qu'une mention de ce type est suffisante ? :
Eugénie : C’est quoi le style d’une joueuse ? – 1 sur JenesuispasMJmais
C. Je dis que toute théorie du jeu de rôles s'appuie sur un système de valeurs défini par la théoricienne (de façon explicite ou non, consciente ou non). J'ai utilisé valeurs parce que ce système inclut à la fois des pratiques qui sont au goût de la théoricienne et d'autres qui sont moins à son goût.
Ainsi, Eero Tuovinen énonce son système de valeurs : "Advocacy is fun, authorship is work" (en français : plaider pour son personnage c'est du plaisir, être auteur de son personnage, c'est du travail". C'est ici un système à deux valeurs :
Valeur 1 : plaider pour son personnage c'est du plaisir
Valeur 2 : être auteur de son personnage, c'est du travail
Il en découle une école de game design qui vise à favoriser le fait de plaider pour son personnage et à limiter le fait d'être auteur de son personnage.
Référence :
Eero Tuovinen : The pitfalls of narrative technique in rpg play sur Game Design is about structure
Je trouve qu'en parlant de système de goûts, on est plus intelligible mais on perd une partie du sens : le fait que les théoriciennes théorisent aussi des choses qui leurs déplaisent. Ainsi Paul Czege quand il dit : "jouer un personnage et son adversité en même temps, c’est ennuyeux" (traduction par Frédéric Sintes)
Référence :
Frédéric Sintes : Centraliser ou partager l’adversité sur Limbic Systems
Autre raison qui me fait privilégier le terme "valeur" à celui de "goût", c'est que je veux pouvoir décrire un systèmes de valeurs qui puissent être positives (j'aime), négatives (j'aime pas) ou neutre (je n'ai aucun avis, je me contente de décrire la pratique). Ce que j'appelle l'esprit d'inventaire, c'est théoriser à partir d'un système de valeurs neutres. Autrement dit faire abstraction de ses goûts lorsqu'on théorise, ou encore sincèrement apprécier toutes les pratiques selon les circonstances (système composé entièrement de valeurs positives)
D. Oui, je suis d'accord sur le fait qu'on peut être prescriptif et qu'on peut sortir de cette histoire de "goût". On est alors prescriptif dans un système de valeurs neutres.
E. Je dis que le système de valeurs est infini dans le sens que :
+ De chacune de tes valeurs on peut inférer des sous-valeurs (ainsi de la valeur "plaider pour son personnage, c'est du plaisir", on peut en déduire la combativité et l'absorption de Frédéric Sintes, la posture d'acteur, le fait que "être auteur de son personnage c'est du travail", le fait qu'"incarner sa propre adversité est ennuyeux" et tout un tas d'autres choses).
+ La théoricienne est inconsciente de la totalité de ses valeurs et le système de valeurs est aussi vaste que l'est le champ d'étude, en l’occurrence infini. Tu pourrais rajouter des valeurs ad nauseam, au sujet de l'immersion, du roleplay, des référents culturels, de la narration, etc, etc... Du système de valeurs de la théoricienne on ne connaît que ce qui est ébauché à travers le contenu, fini, de ses communications. Cela fait que la majeure partie du système de valeurs de la théoricienne nous reste inconnu, ou soumis à conjecture.
F. Je suis d'accord avec toi quand tu dis que la théoricienne peut se borner à définir la sous-catégorie de jeu de rôle qui l'intéresse. Je suis d'accord aussi qu'on peut extrapoler vers un ensemble plus vaste de jeux de rôles, parfois oui, et parfois non quand justement la réflexion est spécifique (ainsi des réflexions sur le jeu où l'on plaide pour son personnage, j'ignore si elles sont extrapolables dans le jeu où on est plutôt en surplomb de son personnage)
G. Le problème quand tu crées un jargon, c'est que de facto tu te retrouves dépositaire d'un terme et les autres auront des scrupules à s'en emparer. Tu rends difficile l'appropriation de tes concepts. Tu fermes le débat, volontairement ou non. Tu crées une réalité irréfutable circonscrite à ton jargon. Ainsi, le Vide Fertile est irréfutable. On utilise l'idée ou on évite de l'utiliser, mais en revanche il est difficile de débattre à son sujet. Quand je parle de jeu intense et de jeu profond, j'évite volontairement le jargon pour que chaque personne puisse réemployer le terme avec sa propre vision des choses.
Références :
Thomas Munier : comment se crée le jargon du jeu de rôle, sur Les Ateliers Imaginaires
Frédéric Sintes : Vide Fertile : la spirale invisible sur Limbic Systems
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Valentin a écrit :
Critique du podcast Méta-théorie
- Je suis très heureux de voir que mon travail t'a inspiré en partie cette réflexion. Je trouve que tu retranscris bien mes idées (sauf quelques broutilles), et j'ai beaucoup apprécié le podcast dans son ensemble. Quelques remarques :
- Je milite pour une relecture critique, pas seulement une relecture. Le mot critique est important, c'est à dire que tant que tout le monde n'est pas satisfait, l'auteur doit retravailler son article. On a un cycle de relecture -> réécriture -> relecture -> réécriture etc... A la fin du processus, tout le monde est satisfait, ou alors l'auteur se positionne contre certaines critiques en conscience et publiquement.
- A la question de qui doit relire, je pense que la critique doit être publique et doit être disponible même après la publication de l'article.
- L'idée d'avoir une relecture à la fois théorique et de compréhension va parfaitement dans mon sens.
- Le fait d'utiliser des liens hypertextes pose problème à cause de l'accessibilité des sources sur le long terme. Il faut s'assurer que la page à l'autre bout du lien restera accessible, et ce n'est pas du tout garanti sur internet. Il est donc recommandé d'ajouter une liste bibliographique détaillée à la fin de l'article afin de retrouver la source précise si besoin.
- Tu parles de l'école de théorie rôliste comme construction subjective du monde. C'est ce que j'entends quand je dis que toutes nos représentations du monde sont sous-tendues par des théories implicites et subjective. Donc lorsque MacBeth dis que toute critique est subjective, je ne peux qu'abonder dans ce sens. De plus, lorsque tu évoques le fait de situer son discours, c'est également ma conception, mais il faut 1) le faire le plus clairement possible, 2) bien se rendre compte que c'est un travail sans fin.
- Tu évoque les théorie rôliste descriptive (qui énoncent comment le jeu de rôle fonctionne) face aux théories prescriptive (qui énonce comment le jeu de rôle devrait être). Je pense que ce point est crucial et qu'on mérite qu'on s'y arrête. La façon dont tu utilise le mot "valeur" est très étrange. Cela m'a rendu confus, et j'utiliserais plutôt le mot "goût". Sinon, je te rejoinds totalement lorsque tu proposes d’expliciter totalement nos "goûts" en matière de jeu de rôle lorsque l'on fait un article de théorie, afin de situer le discours.
- Par contre, je pense qu'on peut être prescriptif et qu'on peut sortir de cette histoire de "goût". Il est possible de faire des théories qui s'attachent à faire des prédictions concernant un type de jeux de rôle et un type de mécanisme, indépendamment des goûts du théoricien. Il faut cependant substituer la prescription ayant implicitement certaines expériences particulières comme objectif (celles qui sont du "goût" du théoricien), par une prescription ayant un objectif explicite.
- Je ne comprends pas ce que tu entends par "système de valeur infini". Ça me semble très fumeux.
- Pour faire une théorie, tu dis qu'il faut définir le jeu de rôle. Ce n'est pas nécessaire selon moi, à moins que tu fasse une théorie sur tout les jeux de rôles. Par contre, je pense qu'il faut définir au moins quelques objets sur lesquels s'applique la théorie, car une théorie peut tout à fait s'appliquer à un sous-ensemble particulier de jeux de rôles. Et ce n'est pas non plus pour cela qu'elle ne s'appliquera pas à d'autres jeux.
- Lorsque tu dis :"Tout le monde est légitime à parler de jeu de rôle", "Toutes les théories rôlistes se valent" et "Dès que tu parles de jeu de rôle tu théorises", je te suis. Par contre, ma position est de dire qu'il est possible de produire un travail méta-théorique qui permette de dégager des critères pour évaluer et améliorer un travail théorique. C'est ce que je fais lorsque j'encourage à soumettre à la critique publique, à citer ses sources, à clarifier son propos, etc... (Article en préparation).
- Tu dis qu'il est dangereux qu'un auteur théorise ses propres jeux, car il n'a plus de vision distanciée. Selon moi, le problème est plus profond: aucun observateur n'est distancié par rapport à son objet. Pour éventuellement s'en sortir, il faut considérer l'observation au sein de la théorie. Il faut une théorie conjointe de l'objet et de l'observation de l'objet. C'est un des principes des sciences humaines contemporaines.
- Le problème de ne pas jargonner et d'utiliser des mots non-consacrés est un gros risque de flou et d'incompréhension. Ce problème est central, je ne développe pas ici.
Mes réponses :
A. Sur tes réprécisions quant à ta vision de ce qu'est une relecture critique, je n'ai rien à ajouter. L'important est qu'elles soient mentionnées, ici.
B. Sur la liste bibliographiques, est-ce qu'une mention de ce type est suffisante ? :
Eugénie : C’est quoi le style d’une joueuse ? – 1 sur JenesuispasMJmais
C. Je dis que toute théorie du jeu de rôles s'appuie sur un système de valeurs défini par la théoricienne (de façon explicite ou non, consciente ou non). J'ai utilisé valeurs parce que ce système inclut à la fois des pratiques qui sont au goût de la théoricienne et d'autres qui sont moins à son goût.
Ainsi, Eero Tuovinen énonce son système de valeurs : "Advocacy is fun, authorship is work" (en français : plaider pour son personnage c'est du plaisir, être auteur de son personnage, c'est du travail". C'est ici un système à deux valeurs :
Valeur 1 : plaider pour son personnage c'est du plaisir
Valeur 2 : être auteur de son personnage, c'est du travail
Il en découle une école de game design qui vise à favoriser le fait de plaider pour son personnage et à limiter le fait d'être auteur de son personnage.
Référence :
Eero Tuovinen : The pitfalls of narrative technique in rpg play sur Game Design is about structure
Je trouve qu'en parlant de système de goûts, on est plus intelligible mais on perd une partie du sens : le fait que les théoriciennes théorisent aussi des choses qui leurs déplaisent. Ainsi Paul Czege quand il dit : "jouer un personnage et son adversité en même temps, c’est ennuyeux" (traduction par Frédéric Sintes)
Référence :
Frédéric Sintes : Centraliser ou partager l’adversité sur Limbic Systems
Autre raison qui me fait privilégier le terme "valeur" à celui de "goût", c'est que je veux pouvoir décrire un systèmes de valeurs qui puissent être positives (j'aime), négatives (j'aime pas) ou neutre (je n'ai aucun avis, je me contente de décrire la pratique). Ce que j'appelle l'esprit d'inventaire, c'est théoriser à partir d'un système de valeurs neutres. Autrement dit faire abstraction de ses goûts lorsqu'on théorise, ou encore sincèrement apprécier toutes les pratiques selon les circonstances (système composé entièrement de valeurs positives)
D. Oui, je suis d'accord sur le fait qu'on peut être prescriptif et qu'on peut sortir de cette histoire de "goût". On est alors prescriptif dans un système de valeurs neutres.
E. Je dis que le système de valeurs est infini dans le sens que :
+ De chacune de tes valeurs on peut inférer des sous-valeurs (ainsi de la valeur "plaider pour son personnage, c'est du plaisir", on peut en déduire la combativité et l'absorption de Frédéric Sintes, la posture d'acteur, le fait que "être auteur de son personnage c'est du travail", le fait qu'"incarner sa propre adversité est ennuyeux" et tout un tas d'autres choses).
+ La théoricienne est inconsciente de la totalité de ses valeurs et le système de valeurs est aussi vaste que l'est le champ d'étude, en l’occurrence infini. Tu pourrais rajouter des valeurs ad nauseam, au sujet de l'immersion, du roleplay, des référents culturels, de la narration, etc, etc... Du système de valeurs de la théoricienne on ne connaît que ce qui est ébauché à travers le contenu, fini, de ses communications. Cela fait que la majeure partie du système de valeurs de la théoricienne nous reste inconnu, ou soumis à conjecture.
F. Je suis d'accord avec toi quand tu dis que la théoricienne peut se borner à définir la sous-catégorie de jeu de rôle qui l'intéresse. Je suis d'accord aussi qu'on peut extrapoler vers un ensemble plus vaste de jeux de rôles, parfois oui, et parfois non quand justement la réflexion est spécifique (ainsi des réflexions sur le jeu où l'on plaide pour son personnage, j'ignore si elles sont extrapolables dans le jeu où on est plutôt en surplomb de son personnage)
G. Le problème quand tu crées un jargon, c'est que de facto tu te retrouves dépositaire d'un terme et les autres auront des scrupules à s'en emparer. Tu rends difficile l'appropriation de tes concepts. Tu fermes le débat, volontairement ou non. Tu crées une réalité irréfutable circonscrite à ton jargon. Ainsi, le Vide Fertile est irréfutable. On utilise l'idée ou on évite de l'utiliser, mais en revanche il est difficile de débattre à son sujet. Quand je parle de jeu intense et de jeu profond, j'évite volontairement le jargon pour que chaque personne puisse réemployer le terme avec sa propre vision des choses.
Références :
Thomas Munier : comment se crée le jargon du jeu de rôle, sur Les Ateliers Imaginaires
Frédéric Sintes : Vide Fertile : la spirale invisible sur Limbic Systems